
Si l’âme bretonne peut parfois paraître comme un ensemble admirablement harmonieux de Saints, de traditions, de coutumes, de langue ou encore d’arts, les Contes populaires et légendes de Bretagne rappelle non seulement l’importance de l’imaginaire collectif dans la constitution de cette âme, mais également le dernier ingrédient, et non des moindres : la coutume verbale, ces expressions et proverbes propres aux Pays bretons que notre Histoire contemporaine a tenté de nous faire oublier.
Au fil des contes et des légendes de notre Bretagne, des lavandières de nuit aux fameuses légendes de l’Ankou, Claude Seignolle retransmet parfaitement cet imaginaire, toutes ces histoires que l’on peut aisément imaginer narrées au coin du feu par les grands-mères aux petits enfants. Loin de l’actuelle virtualité « quasi-palpable » des consoles vidéos, ces contes stimulent l’imaginaire des plus jeunes, poussent au rêve en imaginant la Groac’h de l’île du Lok et la clochette d’Houarn, ou en se représentant l’Ankou sur sa charrette, ou M. de Ker-Gwenn – petite plaisanterie bretonne sur la pâleur du spectre de la Mort.
Et ces contes, à l’instar des fables de la Fontaine, ne sont pas juste des histoires, mais servent un propos moral, une maxime implicite qui façonne ces jeunes générations et leur savoir-être.
A ce titre, la légende des Kannérez-noz (les lavandières de nuit) est particulièrement intéressante : Wilherm Postik, frivole et sans Foi, a abandonné sa mère et ses sœurs à l’Avel fal (« mauvais air », nom donné par les bretons à toute influence maligne) pour en recueillir l’héritage. Mais une nuit, lors d’une pérégrination ivre, celui-ci entend la complainte des lavandières : « Quen na zui kristen salver, rede goële’hi hou liçer, didan an earc’h ag an aër (Jusqu’à ce qu’il vienne chrétien sauveur, il nous faut blanchir notre linceul, sous la neige et le vent). » Par orgueil, il tomba dans le piège tendu et, se trouvant de sens pour tordre le linge, se fit saisir par l’Ankou, non sans avoir reconnu sa mère et ses sœurs qui criaient « Mille malheurs à qui laisse brûler les siens en Enfer ! ».
Ces quelques lignes font ressortir, en toute simplicité, quelques principes de vie essentiels comme le devoir de piété, l’amour des siens, l’importance de la charité ou encore la prière pour le repos de l’âme de nos défunts.