C’est un point récurrent dans les débats politiques : Nantes, aujourd’hui chef-lieu du département de la Loire-Atlantique et de la région Pays de la Loire, est-elle bretonne ? En se basant uniquement sur des faits historiques, la réponse est sans appel : bretonne depuis la Bataille de Jengland de 851 et le Traité d’Angers signé entre Erispoë et Charles le Chauve, siège de la principale résidence ducale bretonne depuis le XV°Siècle et les travaux réalisés par François II de Bretagne, elle est également le siège de la Chambre des Comptes de Bretagne entre 1493 et 1791, année de leur suppression.
Ville d’Alain Barbetorte et d’Anne de Bretagne, Nantes a longtemps été indissociable de la Bretagne – même lors de la définition arbitraire des départements par la Révolution. Ville où français, breton et gallo se côtoient, elle est l’une des plus belles représentations de la Bretagne, de son Histoire et sa Culture. L’un des ouvrages les plus intéressants sur ce sujet est « Noms de lieux bretons du Pays nantais » de Bertrand Luçon, où l’auteur précise :
« Le breton a été parlé traditionnellement en Pays nantais pendant 1 500 ans. Plus on étudie le sujet et plus on s’éloigne des idées reçues, en particulier de cette légende aussi tenace qu’infondée, selon laquelle on n’a jamais parlé breton à Nantes. Je précise que le Pays nantais, objet de mon étude, correspond peu ou prou à la Loire-Atlantique, mais il inclut aussi quelques communes aujourd’hui dans le Morbihan, situées à l’est de la Vilaine. Par exemple Pénestin ou encore Ferel. Historiquement, le Duché de Bretagne était divisé en évêchés et j’ai travaillé sur cette base. Le Pays nantais, c’est l’évêché de Nantes, dans l’ancien régime. »
De fait, c’est une décision relativement récente qui retire Nantes de la Bretagne : le 30 Juin 1941, le Maréchal Pétain et son gouvernement publie le décret 2727 qui dans son Article 2 rattache, officiellement, Nantes à la Région d’Angers. Cette décision venait, en partie, de la volonté du géographe allemand Walter Christaller, avec notamment une amélioration de la gestion logistique pour la plateforme angevine avec l’ajout de la Loire-Inférieure.
Et c’est ce trait logistique et bureaucratique qui, aujourd’hui encore, guide les délimitations de régions administratives, comme le montre les conclusions du rapport Balladur de 2009. Dans la dynamique de la réforme territoriale de 2014 avec, notamment, la création de nouvelles régions, seules les dimensions économiques et démographiques ont été déterminantes, pas les dimensions culturelles et historiques.
La question nantaise est donc évidente : Nantes, et le pays nantais, sont bien évidemment bretons dans leur essence, culture et Histoire. Par contre, la véritable question ici est la pertinence de ces régions « hors sol », sans aucun lien avec le pays réel ni les particularités locales. Quel devenir pour ces régions fondées sur le sable, où seule l’efficience bureaucratique en juge la qualité ?